« Le père de la littérature ivoirienne », l’écrivain Bernard Dadié, homme engagé et auteur d’une oeuvre prolifique dans laquelle il a abordé tous les genres, est mort samedi à 103 ans.
« La Côte d’Ivoire vient de perdre son plus grand écrivain », a annoncé à l’AFP le ministre ivoirien de la Culture, Maurice Bandaman.
« Quelle tristesse ! Bon voyage tonton et merci pour tous tes écrits et pour ta droiture qui nous inspire », a réagi l’écrivain franco-ivoirien Serge Bilé sur sa page Facebook.
Bernard Dadié a abordé tous les genres littéraires : poésie, roman, chroniques, contes traditionnels et surtout théâtre.
Né en 1916 à Assinie (au sud-est de la Côte d’Ivoire), il se fait connaitre dès 1934 avec une pièce de théâtre satirique, Les Villes.
En 1950 il publie un recueil de poèmes engagés, Afrique debout ! qui dénonce les relations de domination entre Blancs et Noirs dans l’Afrique coloniale.
Son autobiographie romancée, Climbié, parue en 1952, est sans doute son oeuvre la plus célèbre, également très critique vis-à-vis du colonialisme. En 1980, son roman Les jambes du fils de Dieu (1980) remporte aussi un franc succès.
Bernard Dadié a reçu deux fois le grand prix littéraire d’Afrique noire avec Patron de New York (1965) et La ville où nul ne meurt (1968).
Un homme engagé
C’est « un pionnier et un géant de la littérature africaine », avait déclaré en 2016 la directrice générale de l’Unesco Irina Bokova.
Ses oeuvres « sont enseignées dans les universités et grandes écoles d’Afrique et d’ailleurs », a rappelé Maurice Bandaman.
Homme engagé, Bernard Dadié fut aussi journaliste, homme politique et militant pour l’indépendance de la Côte d’Ivoire (colonie française jusqu’en 1960).
Cet engagement au sein du Parti démocratique de Côte d’Ivoire — Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) — lui vaudra un séjour d’un an en prison, entre 1949 et 1950.
Après l’indépendance, il a été de 1977 à 1986 le ministre de la Culture du premier président ivoirien Félix Houphouët-Boigny.
« Bernard Binlin Dadié est l’écrivain le plus fécond de la littérature néo-africaine […] et avec Léopold Sédar Senghor, le plus traduit », selon Nicole Vincileoni, universitaire et auteure d’un ouvrage d’analyse de référence sur son oeuvre.
« Sa littérature est à la fois poétique et engagée, à l’image de l’homme », a réagi auprès de l’AFP Serge Bilé, écrivain et présentateur de télévision en Martinique (Antilles françaises), qui lui avait rendu visite plusieurs fois ces deux dernières années pour la préparation d’un livre à paraître, 100 écrivains pour Bernard Dadié.
« Dadié et Aimé Césaire sont à mes yeux les deux faces d’une même pièce, théâtrale et poétique, rebelle et engagée », écrivait Serge Bilé en 2016.
« Nous nous inclinons devant sa mémoire », a déclaré le ministre Maurice Bandaman, souhaitant « un hommage national ».
« Écrire est, pour moi, un désir d’écarter les ténèbres, un désir d’ouvrir à chacun des fenêtres sur le monde », avait déclaré l’écrivain, en recevant en 2016 le premier prix Jaime Torres Bodet de l’Unesco.